30 AVRIL
28 MAI 2005Rodolphe Huguet propose un travail artistique qui mêle douceur et violence dans une sorte d’exploration autour des limites réelles et métaphoriques des matériaux. Par le détour d’une douce dérision dans laquelle il lui arrive de se mettre en scène, il souligne nos croyances et nos repères socioculturels qui structurent la représentation et la transformation du réel. À l’écoute des fines expressions des matériaux traditionnels comme des techniques les plus contemporaines, il développe une pratique décalée dans laquelle l’humour n’exclut pas la violence, le soin du détail coïncide avec la déraison la plus affirmée. En effet, ses oeuvres sont empreintes d’un certain activisme visant les procédés marchands par lesquels la représentation du réel sert une identité territoriale. Alors il endosse le rôle et s’habille du costume culturel des sociétés occidentales pour nous amené à la caricature acerbe de nos propres repères.
En se confrontant à des projets qui dépassent tout sens de la mesure, il trouve le moyen de construire un monde imaginaire qui rappelle à la fois les aventures d’un Jules Verne avec l’obsession critique d’un Thomas Bernhard. On ne sait plus où commence le jeu métaphorique et où s’impose encore la violence du réel. Au Québec, Rodolphe Huguet a édité et distribué un magazine d’annonces proposant d’acquérir avec le sérieux pléthorique du discours commercial des icebergs du Saint Laurent. En Inde, il a demandé à des peintres d’affiches de cinéma de le mettre en scène dans le costume d’un père Noël aux dix bras de Siva puis s’est filmé dans un ballet improvisé en pleine rue debout sur le porte-bagages d’un cycliste. Si parfois l’ironie semble dominer son oeuvre, elle est toujours généreuse. Ses gageures sont toujours sincères et motivées par l’honnête intention de jouer avec le public comme avec ses complices.
Jérôme Diacre